25 février 2017 § § permalien
Je ne vais pas me faire que des amis en vous disant que je voterai Macron aux prochaines présidentielles. Ce n’est pas ce que j’avais prévu, mais les résultats de ces primaires ineptes étant ce qu’ils sont, je n’allais pas m’acoquiner avec un frondeur qui aura passé son temps à miner un quinquennat. Une espèce de Iago ou de Judas, selon votre idée des traîtres. De plus, non seulement il n’a ni la carrure, ni l’envergure, mais son programme est une hérésie susceptible de transformer une nation en assistanat.
Quant à l’autre tribun gauchiste, il parle bien, c’est un fait, pour développer des thèses datant du début du siècle dernier. Le communisme est bel et bien terminé, et depuis longtemps. Il faudra le lui dire afin qu’il s’évite le ridicule. Même à Cuba on le rejette. Il n’y a guère qu’en Corée du Nord qu’on porte la veste qui habillait son hologramme.
Enfin il est inutile de vous entretenir des candidats de droite, extrême ou pas, avec leurs guirlandes d’affaires louches qui scintillent aux yeux des juges.
Alors, pourquoi Macron ? Serait-ce le ralliement de Bayrou qui m’attire ? Pas même, je l’avais décidé avant. Cependant ce dernier, ayant fait ses humanités comme on disait autrefois, agrégé de lettres classiques, on peut penser avec raison que sa vision du monde est fondée sur l’ouverture, le dialogue, la connaissance. C’est l’honnête homme tel que Montaigne en avait esquissé le portrait.
Macron fut banquier avant d’être ministre de l’économie et des finances. C’est, de mon point de vue, un excellent apprentissage pour diriger un pays au sein d’une Europe confrontée aux assauts économiques des autres puissances. S’y frotter pour gagner sa place et la garder, seule alternative au repli sur soi tragique des imposteurs d’une économie de la décroissance.
On nous dira que Macron n’a pas de programme. Il le dévoile pourtant régulièrement, par petites touches. Il suffit de lire ou d’écouter.
Mais là n’est pas l’important. Car, pensez-vous vraiment qu’un programme est appliqué un jour ? Le seul programme acceptable est celui du pragmatisme et de la réactivité. Il faut être jeune pour agir ainsi et ne pas guerroyer avec l’arsenal formaté par les ans des pachydermes décatis.
La jeunesse, l’enthousiasme et le dynamisme de Macron sont nos atouts pour affronter le monde.
26 novembre 2016 § Commentaires fermés sur Primaires Juppé-Fillon § permalien
Je n’ai jamais voté à droite, hormis Chirac pour éviter Le Pen lorsque le stratège de pacotille Jospin fut éliminé. Je ne recommencerai pas, surtout si Fillon se retrouve face à la Marine nationaliste. Je les laisserai discuter entre eux du Vercingétorix, de Clovis et de Jeanne d’Arc. Quelle que soit l’issue, en effet, le cataclysme aura lieu, alors autant ne pas y avoir participé.
Puisque Fillon aime l’histoire, surtout de France, et qu’il l’arrange à sa manière, disons simplement qu’avec lui c’est le retour au moyen âge, à l’obscurantisme, voire à l’inquisition ou, plus sûrement, à l’esclavage des serfs quand ceux-ci, taillables et corvéables à merci, étaient ponctionnés et hachés menus alors que seigneurs et curés, non seulement se tournaient les pouces, mais de plus étaient exonérés des taxes, gabelles et autres impôts.
Ne vous y fiez pas, je ne serais pas étonné qu’à force d’en avoir avalé sans piper mot sous le royaume ombragé de l’autre excité, le Fillon se fût mué en couleuvre tentatrice du pommier d’Eden.
Son concurrent Juppé aime aussi l’histoire, mais d’une manière plus progressiste, plus intelligente, plus exacte en un mot. De même tendance politique certes, mais issu des lumières, de l’instruction, de l’ouverture d’esprit, de la tolérance. C’est sans doute à cause de ça qu’il n’a aucune chance, tant une grande majorité des électeurs de droite est bornée et inculte.
Quant à la gauche, qui va se perdre dans des primaires imbéciles et une multitude de candidats où des Laurel et Hardy vont se frotter à d’autres Buster Keaton ou Charlot de seconde zone, elle ferait bien d’y prendre garde, car voter demain Fillon pour cette répétition générale de la présidentielle espérant qu’il sera plus aisé de le battre ensuite, est une vue de l’esprit tant la tendance actuelle est à l’alternance.
Alors, à choisir, je préfère encore Juppé, l’homme des lumières progressiste, à Fillon, l’homme de l’ombre rétrograde.
9 avril 2012 § Commentaires fermés sur Sarkozy, rabot de la république § permalien
La liberté se cadenasse, l’égalité se distend et la fraternité s’évapore. Ce n’est pas une découverte, mais hier soir me prit la nécessité de faire l’inventaire. J’ai rempli des pages et grillé quelques cigarettes; c’est effrayant. Mais je vous en ferai grâce, le résumant en bas de page.
Il faut donc se rendre à l’évidence, le règne de Sarkozy, en dehors de toute polémiques liées aux difficultés financières qui ne sont qu’un prétexte supplémentaire à raboter le reste, fut, et demeurera dans les mémoires, celui le plus attentatoire à l’image de la France, à ses concepts égalitaires, son principe de liberté et sa vocation à la fraternité.
Nul autre que lui n’aura, avec une telle constance, terni la devise qui s’affiche aux frontons de nos mairies, gravée en lettre de sang par ceux qui luttèrent pour qu’elle s’appliquât sans restriction.
Une société ne peut survivre sans ordre, mais entre l’ordre tyrannique et le laisser-aller anarchique il y a tout le camaïeu de la vie dont notre pays, mises à part quelques périodes sombres de son histoire, a toujours su dessiner et peindre les nuances pour l’admiration et l’envie d’autres peuples moins favorisés, plus divisés.
Si l’on en croit l’épouvante de saint Jérome dans sa lettre à une veuve, on peut dater l’émergence de la France un jour de l’hiver 407 alors que les glaces, figeant le Rhin, permirent aux peuple barbares de pénétrer massivement dans la Gaule romaine. Burgondes, Wisigoths, Francs, Alamans, Alains, Saxons et d’autres vinrent occuper les Gaules de Reims à l’Aquitaine, d’Arras à la Narbonnaise. Rome encore administrait son empire, mais quelque quatre vingts ans plus tard Clovis se faisait sacrer roi. Chef d’une petite tribu de guerriers Francs il devenait le premier roi d’une entité politique de laquelle tous ses successeurs allaient se réclamer, le Royaume des Francs, Regnum Francorum(1).
Or, si cette invasion fut vécue tragiquement par quelques uns, elle ne fut que le début d’un mixage de ces peuples ; l’acculturation s’opérait et se poursuivit jusqu’à nos jours pour ce vivre ensemble harmonieux qui est notre caractéristique.
La France, extrémité de cet entonnoir qu’est l’Europe ne pouvait échapper au destin de faire d’elle le creuset où viendraient se fondre les tribus, les clans, les ethnies aux mœurs, aux coutumes, aux religions si multiples pour créer ce peuple unique aux particularismes si étonnamment disparates et devenir si profondément semblables à mesure de l’assimilation. A l’image peut-être de ses paysages qui font de notre pays le reflet en miniature de tout ce qui existe sur Terre.
Il n’est pas un pays au monde où une telle diversité ait une cohérence aussi totale(2).
Aujourd’hui, alors que la France inéluctablement se fondra dans cette autre entité politique qu’est l’Europe et qu’elle devrait, par son histoire, montrer le chemin à suivre, elle se replie, se recroqueville dans le rejet, la défiance, le mensonge, la peur, l’injustice.
Sarkozy n’aura su qu’être le rabot de la République.
Car ici ce sont des journalistes qu’on harcèlent ou qu’on met en examen pour avoir dévoiler des exactions politiciennes(3).
Là ce sont des fichiers que l’on crée pour répertorier ceux qui auraient l’outrecuidance de contester(4).
Nos routes qui se parsèment de robots sans tolérance, évinçant le jugement de l’homme; nos villes qui s’ornent de caméras, totalement inefficaces, mais espionnant tout un chacun.
C’est le procureur Courroye dont on annule la décision de mise en examen, pour entorse à la procédure(5).
Ce sont les prisons surpeuplées. Les garde à vue injustifiées.
Ailleurs ce sont les familles, quand elles ne sont pas éclatées, qu’on renvoie par charter.
Les banlieues abandonnées qu’on veut traiter au Karcher mais qu’on se garde bien de visiter.
Les chômeurs qu’on accuse d’entretenir le chômage par leur passivité(6) et dont on rabote les maigres ressources.
Les salariés aux émoluments de misère qui vivent dans leur voiture faute de pouvoir se loger.
Les sans-abris qu’on éjecte des immeubles, dont on détruit les campements.
Les nantis dont on amplifie les privilèges.
Les étudiants étrangers qu’on expulse par circulaire grâce à la circulaire Guéant(7). Les préfets qui se permettent de demander des comptes lors du recrutement d’un violoniste virtuose à Angers(8).
Là encore c’est une partie de la population qu’on stigmatise, musulmans, roms…
Des arrestations arbitraires, pour le «fun», quitte à relâcher ensuite.
Des parents que l’on rend coupables des erreurs de leurs enfants. Etc. Etc.
Il n’est pas un jour sans qu’une nouvelle loi, aussi farfelue que l’idée qui la fit éclore, ne vienne raboter un peu plus les valeurs qui firent notre pays.
Quant à l’image diplomatique de la France, écoutez ce qu’en disent ces journalistes dans l’émission de Pierre Weill sur France inter(9). Pauvre Kouchner — que je ne plains pas — en a-t-il dû avaler des couleuvres ! Et Juppé aujourd’hui, se laisse-t-il rabaisser comme J.D. Lévite ?
Quand on ne respecte même pas ses propres collaborateurs, comment peut-on croire qu’on respectera ses administrés ? Se respecte-t-on soi-même, d’ailleurs ?
La liste n’est pas exhaustive et il faudrait d’autres pages pour énumérer ces entorses à la démocratie ; alors, pour paraphraser le dédain que le candidat de la continuité exprima dernièrement lors d’un meeting à propos de son seul concurrent, nous conclurons par cette question, fondamentale désormais, » et ça voudrait encore gouverner cinq années ? «
Voir les liens du billet sur Le Plumier
5 avril 2012 § § permalien
Hollande caracole, serein ; Sarkozy cravache, hypoglycémique ; Mélanchon galope, dopé aux boniments ; Joly chute, faute d’y voir clair et les autres trottinent ; la présidentielle est une course de haies qui fait les délices des parieurs. Mais d’eux seuls tant cette cavalcade est soporifique.
Heureusement il y a Aphatie — qui est au journalisme ce que le caniveau est au trottoir, à éviter en l’enjambant, ou encore ce que la corbeille à papiers est aux brouillons — qui vient pimenter de sa déontologie élastique le spectacle.
Résumons. Le lendemain de la chute de Joly dans les escaliers d’un cinéma, le speaker salonnier, devait la recevoir sur RTL. Courtoisement averti de l’incident par les proches de la candidate, après mûres réflexions, craignant sans doute d’être devancé alors qu’il tenait l’unique scoop de sa vie, il décida d’en informer la plate-bande de ses auditeurs. Il twitta* la nouvelle, ajoutant que la campagne était momentanément interrompue.
Il a beau vouloir s’en expliquer**, son excuse peut rejoindre l’égout, destinée de tout ce qui vogue sur le caniveau, ou la corbeille à papiers avec le bouquin qu’il y jeta lors d’une émission télé, car, la première réaction d’un humain doté d’une sensibilité décente, d’une conception un tant soit peu élevée de la dignité, eût été de lui témoigner de la commisération. A tout le moins un peu de compassion.
Rien ! Pas même une interrogation sur son état de santé. Juste cette jouissance, dont on imagine qu’elle fut sautillante et ponctuée d’onomatopées aigües, à signaler que sa campagne était suspendue. Sans preuve ni certitudes.
Aphatie appâté, le folliculaire de Twitter.
A son sujet, je ne saurais trop conseiller aux heureux invités de ses péroraisons matinales de ne pas répondre à ses questions. Il ne faut jamais répondre aux questions. Surtout lorsqu’elles sont indigentes. C’est une technique bien connue de tous les représentants de commerce, donc des politiques.
Salvador Dali avait haussé l’astuce au rang de l’art. Devant un micro, une caméra, il développait son histoire sans se préoccuper d’autre chose et surtout pas des questions qu’on lui posait. Aussi se souvient-on de lui et nullement de ses interlocuteurs. D’ailleurs, quoi de commun entre un génie et un vulgaire interviewer ? Le micro peut-être mais certainement pas le texte.
* Réaction du fils d’Eva Joly sur Rue89
** Réponse de J-M Aphatie sur Slate