
Notre-Dame sous la neige – Eugène Galien-Laloue
Il est étonnant de constater avec quelle constance tout est sujet à polémique. Il ne s’agit nullement d’esprit critique, ce qui serait nécessaire et profitable, non, de la seule acerbité due à la méchanceté, la convoitise, la jalousie. Ça n’a pas manqué, des esprits chagrins, pour ne pas dire décérébrés, ont critiqué l’émotion qui s’est emparée d’une foule sidérée après l’incendie de Notre-Dame.
Du premier imbécile venu au syndicaliste bon teint, les dons des riches, pour ces bilieux, ne sont qu’étalement de leur superbe et non acte désintéressé. Dans sa prose haineuse, un crétin – mais il n’est pas le seul débile péremptoire – se plaît à invoquer un complot qu’il aurait prévu de longue date, une machination dont il est certain, d’un cartel d’entreprises manipulant dans l’ombre Macron ourdissant (je n’ai pas bien compris qui ourdissait tant était fumeuse la thèse) le projet d’incendie pour que ces donateurs obtiennent les travaux de réfection, évoquant pour preuve – ce qui m’interroge sur la santé mentale du dit prédicateur – la destruction des Twin Towers ou l’incendie du Reichstag. D’autres s’étonnent même que de vieilles poutres de chêne puissent s’enflammer, eux qui peinent pour allumer au chalumeau leur barbecue dominical. Du grand n’importe quoi qui n’a pu fuser qu’aux détours de neurones que l’alcool, ou la démence, entortille. Jusqu’à quelques prétendus économistes qui regrettent cette générosité trop ciblée ou de soi-disant penseurs dont les croassements expliquent qu’après tout, l’éphémère étant la caractéristique de la vie, la destruction partielle d’une œuvre d’art n’est que banalité.
Mais il ne pouvait en être autrement puisque de nos jours la stupidité déferle à la vitesse d’un torrent de boue, saccageant les esprits.
Finalement, me suis-je dit sans doute pour me rassurer quant au devenir de l’espèce humaine, ne s’agit-il que d’individus aigris inconscients de leur médiocrité.
Notre-Dame est à la France ce que le cœur est à l’être, lorsqu’il s’enflamme la déraison l’emporte.
Tout a été dit et répété ces derniers jours sur le symbole des cathédrales et plus spécifiquement sur celui de Notre-Dame. Il n’est pas nécessaire d’y revenir. Mais retrouvant un brouillon concernant un autre sujet où je comparais ces flèches gothiques s’élançant vers le ciel à nos fusées modernes conquérant l’espace, je me dis que rien n’a changé depuis le moyen âge, depuis toujours en définitive, l’homme est à la recherche de l’inconnu, à la résolution de ce mystère : qu’existe-t-il au-delà de notre horizon ?
Et la réponse ne peut transiter que par les symboles que nous créons, totems devant lesquels nous nous prosternons, humbles côtoyant notre grandeur, et pour lesquels, grands ou petits, riches ou pauvres, croyants ou non, nous fûmes et sommes toujours majoritairement unis et prêts à tout pour les bâtir, les ériger ou les restaurer ; donner sa vie, sa liberté, son temps, son argent.