On ne perd pas un enfant sans en subir des conséquences terribles, tant dans sa manière de vivre, de se comporter avec les autres, que dans dans sa propre intimité, dans la perception que l’on a soudain de son existence.
Je le sais. Depardieu également dont le fils disparu portait le même prénom que le mien. Tant d’autres le savent aussi et tous nous nous gardons bien de porter un jugement sur l’apparence. Nous devenons sans doute indifférents aux mesquineries puériles de nos contemporains. Le regard des autres ne nous intéressent plus.
Seuls les imbéciles, qui sont légions, se permettent d’émettre des critiques à l’encontre de ceux qui n’entrent plus dans le moule de leur microcosme, les vouant aux gémonies, les mettant au ban de la société, les condamnant dès lors qu’ils ne respectent plus la règle. Depardieu, en gagnant de l’argent, beaucoup d’argent, s’attire la vindicte des jaloux. Depardieu, en vendant son hôtel particulier, magnifique très certainement, devient la risée de ceux qui ne pourront jamais l’acquérir. Depardieu, en quittant la France, s’installant à sa frontière, s’entend critiquer par la multitude qui n’hésite pas, quand l’occasion s’en présente, de truander l’Etat.
Depardieu voit les choses en grand quand ses contempteurs resquillent sur des centimes. A chacun sa stature.
Il n’est pas le premier à chercher des cieux fiscalement plus cléments et ne sera pas le dernier, ce phénomène remontant à plus de 1500 ans comme je l’ai déjà mentionné dans un précédent billet (La révolte des taxés), lorsque Chilpéric 1er voulut taxer son peuple pour regarnir les caisses vides de son royaume. La conséquence fut un exode massif (lire Grégoire de Tours). C’est récurrent. A l’imbécillité d’une mesure répondait la subtilité d’un peuple, d’autant qu’au Moyen Âge la rétorsion était sanglante alors que la circulation des personnes n’était guère freinée par la rigueur des frontières.
Aujourd’hui nous vivons en Europe et, à ce que je sais, la liberté de circuler et de s’installer où bon lui semble est le privilège de chacun des citoyens de cette nouvelle entité. Il n’y a donc là nul reproche à formuler comme il serait inconséquent d’en critiquer les raisons, quand bien même la principale serait fiscale.
Dès lors ce n’est pas celui qui part qui doit être montré du doigt, voué aux gémonies, mis au ban de la nation, mais les chefs d’Etats qui n’ont pas su construire l’Europe comme il eût été nécessaire de le faire dès le départ, c’est à dire harmoniser totalement cette nouvelle entité sur tous les aspects, dont entre autre la fiscalité qui se devrait d’être identique dans tous les Etats de l’Union. Ce sont eux qui sont à blâmer pour leur manque de civisme européen.
Dans le procès injuste que l’on fait à Depardieu et quelques autres c’est en réalité l’incurie de nos gouvernants qui est en cause et elle seule. On a bien vu d’ailleurs comment fut traitée la crise traversée il y a peu. Une Europe véritablement fédérale aurait évité cette cacophonie invraisemblable de petits chefs se disputant autour d’un plat de lentilles pour en obtenir la meilleure part.
À quand un gouvernement unique? En ce sens son départ pour la frontière belge est un bienfait et, espérons-le, sera le prélude à une prise de conscience pour œuvrer en conséquence.
Depardieu, l’exil?
15 décembre 2012 § 9 commentaires § permalien