Une jactance de concierge

5 septembre 2010 § Commentaires fermés sur Une jactance de concierge § permalien

Ségolène Royal, dont on dit qu’elle dirige la région Poitou-Charentes mais qui confond direction et commandement, autoritaire qui plus est, à la Sarkozy à bien y regarder, vient d’obtenir de la part du ministre de la Défense, Hervé Morin, une fin de non-recevoir à sa proposition, qui tourne à la marotte, d’encadrer les jeunes délinquants par des miliaires dans des casernes rochelaises.

La réponse du ministre est on ne peut plus claire. Les militaires ne sont ni des garde-chiourmes ni des éducateurs à moins de songer que Tataouine ou Biribi étaient d’excellents prolongements au bagne pour enfants de Belle-Île dont la fermeture définitive ne remonte pas à si loin, 1977 pour être précis après sa transformation en IPES en 1947. Mais quelle arrière-pensée rôde dans l’esprit de la concierge du Poitou pour envisager une telle absurdité ? Si ce n’est la nostalgie d’un temps qu’on espère révolu — mais dont quelques esprits rétrogrades en font émerger la proue malsaine — ce pourrait être alors simple populisme destiné à montrer que, si l’on manque d’idées, au moins n’est-on pas chiche en propositions démagogiques aptes à flatter quelques abusés du caquetage.

Tout d’abord soyons clairs, un militaire a autre chose à faire qu’encadrer des délinquants, jeunes ou pas ; ce n’est ni son rôle ni sa spécialité. Aucunement formé à cette tâche, désemparé face aux ruades de têtes brûlées qu’on ne dompte pas par la force — ce n’est pas un éducateur, s’il l’avait désiré il n’aurait pas choisi l’uniforme — le danger inhérent à cette absence de formation et surtout de souhait de sa part est une dérive vers l’absolutisme de la répression, comme l’ont vécue les générations d’enfants échoués à Belle-Île ou ailleurs, surveillés par d’anciens militaires en majorité alcooliques dont les brimades et sévices systématiques menaient à la rébellion quand ce n’était pas la mort. Il suffit de lire les récits accablants de ces rescapés pour douter définitivement de la valeur éducative de cette mesure et s’horrifier de ce qu’endurèrent ces gamins jusqu’à leur dix-huitième année avant d’être expédiés vers d’autres villégiatures. Une simple lecture de ces abominations ne laisse pas indifférent tout être normalement constitué, à moins d’être totalement insensible, ce que je ne crois pas de Ségolène Royal. D’ailleurs, partout où les militaires deviennent garde-chiourmes, les exactions commises se multiplient, les exemples sont nombreux, de Guantanamo aux camps des dictatures asiatiques.

Ensuite vers quoi s’achemineraient ces enfants, leur peine accomplie ? Quel autre avenir pourraient-ils avoir sinon celui des armes ? Piètres recrues pour la majorité d’entre eux qui auraient subi sans aucune conviction une pédagogie militaire. Car il serait bien improbable qu’on leur enseignât autre chose que la violence répondant à la leur.

Enfin, comme il existe déjà des centres spécialisés — la solution serait de les développer et leur donner les moyens de fonctionner correctement — dont les éducateurs, pourtant formés à ces problématiques, ne parviennent pas toujours à inverser le cours d’une vie qui part à vau-l’eau, je ne vois pas ce que pourrait apporter de plus un sergent-chef qui ne saurait qu’aboyer des ordres. Hormis ancrer un peu mieux dans l’esprit de ces enfants l’amertume et la rancœur.

Tout cela est absurde et à mon sens participe plus d’un coup d’annonce que d’une volonté de trouver de réelles solutions.

Une jactance de concierge, sans plus.

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