
Le chant du coq ! À Rochefort, il y a quelques jours, s’est tenu le procès d’un coq, assigné avec sa propriétaire à comparaître devant les juges pour trouble anormal de voisinage.
Retour au moyen âge où les condamnations d’animaux étaient chose courante. La pendaison d’un cochon s’effectuait avec le même cérémonial que s’il se fût agi d’un humain. On jugeait d’ailleurs en pagaille les animaux accusés facilement de tous les maux. De l’anguille au renard, du loup au sanglier, des charançons aux sauterelles, la justice condamnait, à mort, à la mutilation, à l’exil, voire à l’excommunication quand le religieux s’y mêlait.
Espérons que ce coq au chant troublant la quiétude de deux retraités limougeauds, ne finisse à la casserole. Même si le coq au vin est un délice dont je me pourlèche à sa pensée la moustache.
Au-delà de la gastronomie, peut-on imaginer pire stupidité que la démarche de ces deux sexagénaires obtus ?
Ce soir le coq dort encore chez lui. Le jugement sera rendu ultérieurement, le 5 septembre. Il a encore de belles matinées pour chanter à gorge déployée, heureux de vivre en découvrant le jour. Grincheux de vivre en l’écoutant » cocoricoter « , nos ulcéreux en instance auront quelques semaines supplémentaires pour tenter de se faire une raison et passer – pourquoi pas, il y en a un qui brait toute la journée près de chez moi – du coq à l’âne.
Parce qu’il m’étonnerait que Maurice – c’est le nom du coq – fût un jour condamné avec sa propriétaire.
Est-il né le juge assez déraisonnable et téméraire pour désavouer ce que la nature a crée ? Quand bien même le magistrat prendrait le temps de la réflexion – son chant du cygne en quelque sorte, au sens primitif de l’expression, non pas avant de mourir mais pour trouver la lumière face à ce péril imminent de déclenchement de guerre civile – afin d’éviter que sonne le glas en remplacement du chant du coq.
« You you ! » s’écrit Strepsiade dans « Les Nuées », allongé sur sa paillasse où il ne peut dormir – saluant comme Corine Masiéro dans ses films lorsqu’elle entre en scène. Aurait-elle plagié Aristophane ?
« Ô Zeus-Roi ! ces nuits sont d’un long !…
« In-ter-mi-nables !… Le jour ne se lèvera-t-il donc jamais ?
« Il y a pourtant un bon moment que j’ai entendu le coq, moi… ».